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Arrêtez de ruiner l'aspect de mon bureau

Dimanche 24 janvier 2010

Les API graphiques (Microsoft MFC/WPF, GTK+, Qt) servent à construire des interfaces graphiques (boutons, menus, onglets...) pour les applications. Elles ont une bonne raison d'être: Permettre une homogénéité des aspects et des comportements, afin que l'utilisateur ne soit pas perdu.

Sauf que la mode actuelle est, bien entendu, à faire le plus flashy possible. Et personne n'est épargné (Linux, Windows...). Je vous donne un exemple: J'ai mon bureau Gnome sous Linux, avec un thème sombre et sobre:



Remarquez comme toutes les applications ont un aspect homogène, que ce soit le contrôle des fenêtres, les boutons ou les onglets. C'est propre, c'est beau, c'est cohérent. Maintenant, faisons entrer un zozo: Chrome.



Et là, c'est le drame. Qu'est-ce que c'est que cet horrible machin en plastic bleu qui vient cracher ses couleurs sur mon bureau ? Mais il y a pire sous Windows, avec par exemple ZoneAlarm et Avast.


Vous n'aimez pas la couleur orange ? Tant pis pour vous.


Purée, je dois cliquer où ?

Personne n'est épargné

...ou presque. Apple est très strict sur ces aspects, et les développeurs s'arrangent généralement pour garder une bonne homogénéité de l'aspect et du comportement. C'est d'ailleurs un des éléments clés de la réputation d'Apple.

Dans le monde Linux, il y a 2 grandes familles: GTK+ (bureau Gnome) et Qt (bureau KDE). Chacun a son "look" particulier, et cela introduit une hétérogénéité désagréable. Par exemple, installez une application KDE sous le bureau Gnome: Elle fonctionne parfaitement, mais elle a un look très différent, et se comporte différemment (Par défaut, c'est un simple-clic pour ouvrir un fichier en Qt/KDE, alors que c'est un double-clic dans GTK+/Gnome). C'est pénible.


Cherchez l'intru... couleurs différentes, icônes différentes, onglets différents, taille de police différentes, cases à cocher différentes...

Et je ne parle pas des applications X-Window ou Tcl/tk. Ajoutez à cela ceux qui travaillent avec leur propre look (Chrome, Opera, Cinelerra...), et ça commence à faire un sale mélange.


Sous Windows, c'est devenu du grand n'importe quoi. Chaque développeur essaie pitoyablement de rivaliser d'originalité (enfin, ce qu'ils pensent être de l'originalité). Qu'importe l'ivresse, pourvu qu'on ait le flacon, le plus voyant et démarqué de la concurrence possible. Hélas.


Sous Windows, ça pique un peu les yeux.

Captures d'écran par softpedia.com

Le pire, c'est que même quand l'aspect est correct, les comportements peuvent être foireux. Même deux logiciels Microsoft vendus ensemble et tournant dans un système d'exploitation Microsoft arrivent à ne pas avoir le même comportement: Cliquez sur la croix pour fermer une fenêtre Word, le document se ferme. Cliquez sur la croix pour fermer une fenêtre Excel, c'est Excel tout entier qui se ferme. Ce n'est pas logique.

Bref, c'est le bordel, c'est désagréable. Les différences de comportement énervent et font perdre du temps. Les différences d'aspect me donnent l'impression d'une incroyable arrogance de la part des développeurs et piquent les yeux. Les logiciels devraient se plier au look et au comportement standard des systèmes d'exploitation. J'ai autre chose à faire qu'à forcer mon esprit à faire du context-switching quand je passe d'une application à l'autre.

Message aux développeurs: Arrêtez de ruiner mon bureau, arrêtez de me faire perdre du temps. Arrêter de vouloir faire original à tout prix. Des logiciels comme le vôtre, j'en ai plein mon ordinateur. Votre logiciel n'a pas besoin de se démarquer des autres. Il n'a rien de spécial. Si je l'ai installé, c'est que j'en ai déjà besoin, vous n'avez plus besoin de me séduire. Si je l'ai installé, c'est que j'ai besoin de ses fonctionnalités, pas de son look.

Arrêtez de nous pondre des interfaces graphiques à la con, flashy et déroutantes. Arrêtez de m'imposer vos goûts. Laissez-moi configurer l'aspect de mon bureau comme bon me semble. C'est même pour cela qu'on utilise des thèmes. Respectez les thèmes que j'ai choisis. J'attends d'un logiciel qu'il fasse le boulot qu'il est censé faire, qu'il le fasse bien et qu'il s'intègre bien au reste du système. Je n'ai pas besoin qu'il me donne l'impression d'être en train de manipuler le cockpit d'un A340, un autoradio, un jouet en plastique ou triper dans une rave-party.

Il y a pourtant parfois de bonnes raisons

Il y a pourtant parfois de bonnes raisons de dévier de la "normale".

Tout d'abord, pour les logiciels ayant besoin de présenter et manipuler des ensembles de données complexes: Logiciels de statistiques, bases de données complexes, données multidimensionnelles... Les interfaces graphiques traditionnelles ne suffisent plus, il faut alors passer à quelque chose de différent et mieux adapté. Par exemple, le logiciel de 3D Blender possède une interface unique et qui paraît très déroutante au début, mais qui a spécifiquement été conçue pour gagner en efficacité sur les manipulations en 3D. Le comportement du clavier et de la souris est également très spécifique (par exemple, les touches clavier n'ont pas la même fonction selon la partie de la fenêtre dans laquelle se trouve le curseur). Le coût d'adaptation se gagne au long terme en efficacité.



Autre exemple: Le ruban de Microsoft Office, tant décrié au début, semble finalement avoir été largement adopté par les utilisateurs et tout le monde s'accorde pour dire qu'il permet de gagner en efficacité.



Si on veut innover, on est souvent obligé de casser l'ancien moule, comme le très controversé Gnome 3 qui rompt complètement avec la notion traditionnelle de bureau avec barre des tâches:



Il est parfois aussi nécessaire de s'adapter au matériel, comme la taille limitée de l'écran des netbooks, ici avec Ubuntu Netbook Remix:



Les nouveaux dispositifs homme-machine (eye-tracking, écran tactiles simples ou multitouch, Wiimote, Microsoft Project Natal...) peuvent nécessiter aussi une interface graphique totalement nouvelle pour exploiter au mieux les possibilités du matériel.


Pour tous ces cas, casser avec les habitudes se révèle salvateur, mais pour l'immense majorité des cas, il convient de coller aux standards en place.

Bon, bien sûr, c'est AMHO, comme on dit.